MEDEE/FUKUSHIMA, extrait, Aurélien Chouzenoux (Cie Jours tranquilles, création 2012/2013)

Extrait d’un travail en cours : composition sonore effectuée par Aurélien Chouzenoux pour le projet Médée-Fukushima.

Excerpt from a work in progress: sound composition performed by Aurélien Chouzenoux for the project Medea-Fukushima.


L’accident nucléaire de la centrale de Fukushima pose de manière décisive la question de la mise en récit d’un phénomène invisible, intraçable et durable. Le concept de catastrophe, formé sur la dramaturgie grecque, n’est plus opératoire pour rendre compte de cette nouvelle catégorie de phénomène. C’est le problème théorique formulé par Yoann Moreau (EHESS/CNRS) dans « Fukushima n’est pas une catastrophe »  : il n’y a pas de concept pour traduire le drame à l’œuvre dans un accident nucléaire, pas de concept et – surtout – pas de dramaturgie. Nous manquons de ressorts tragiques pour rendre compte de drames ponctuels et domestiques dispersés dans l’espace et dans le temps, mais dont la somme, au fil des années devient massive.

Les accidents nucléaires accroissent un bruit de fond qui incommode le vivant et accroît la probabilité de ses dégénérescences. Cela pose un problème théorique (Fukushima n’est pas une catastrophe, comment peut-on la qualifier ?) et un terrain d’étude académique (les données concrètes qui concernent Fukushima). Cela pose également question du point de vue dramaturgique : comment faire spectacle d’une tragédie sans catastrophe ? Le bruit de fond peut-il constituer un spectacle sans pour autant devenir signal ? Comment fonder une intrigue sans émergence d’un dénouement ? La radioactivité affecte le vivant de manière organique, en deçà de tout registre de prédication. Autrement dit, quoi que l’on en dise, quoi que l’on en pense et quoi que l’on fasse, l’accroissement de la présence d’isotopes radioactifs est une donnée avec laquelle il s’agit désormais de composer dans notre chair. Dès lors, comment fonder une intrigue sur des processus qui se produisent à l’échelle cellulaire, de manière insensible, sous la forme d’un stress organique. Comment mettre en scène une ambiance organique dont les protagonistes ne sont pas conscients ? Comment rendre compte d’un drame qui se joue en deçà de ce que nous sentons?

Texte extrait du projet MEDEE/FUKUSHIMA (CIE JOURS TRANQUILLES, création 2012/2013)

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Dominique Balaÿ

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